I
MOTION
GENERALE
L’Union Culturelle Wallonne réunie en Congrès statutaire et
d’orientation à Ottignies ce 12 avril 2008 se réaffirme comme le plus
ancien et le plus important mouvement volontaire fédérateur wallon.
Forte
de ses cinq Fédérations provinciales, de ses trois cents sociétés
locales et de ses nombreux membres à titre individuel, l’Union
Culturelle Wallonne entend défendre et promouvoir les valeurs
culturelles véhiculées par les langues régionales endogènes de la
Wallonie.
L’Union décide de s’adresser et de fédérer davantage tous les Wallons
d’ici, d’Europe et du monde afin qu’ensemble ils soient les témoins
attentifs et les responsables de leurs spécificités.
Il
faut à la Wallonie un véritable projet culturel qui révèle son identité
de région dans l’Europe des cultures.
L’Union Culturelle Wallonne est un mouvement au service de la démocratie
culturelle ; son action est guidée par un souci permanent d’ouverture et
de progrès.
L’Union demande avec insistance au peuple wallon une conscience plus
vive de sa propre culture dont les composantes essentielles sont les
langues régionales. L’unique chance d’affirmer notre identité est de
travailler et de nous engager dans l’unité.
II
MOTION
RELATIVE AU CONSEIL DES LANGUES REGIONALES ENDOGENES
DE LA COMMUNAUTE FRANCAISE DE BELGIQUE
s’appuyant
sur le décret de la Communauté française de Belgique
du 14 décembre 1990 relatif à la protection de la promotion des langues
régionales endogènes ;
L’Union Culturelle Wallonne, réunie en Congrès
statutaire et
d’orientation ce 12 avril, à Ottignies
recommande
La poursuite de la politique d’aide à l’édition
entreprise par ledit conseil ;
réclame
une augmentation des budgets consacrés aux langues
régionales qui tienne compte au moins de l’inflation ;
requiert
un élargissement des activités dudit Conseil en vue
de l’instauration d’une politique globale de mise en valeur des langues
régionales ;
exige
la réactivation des démarches entreprises par ledit
Conseil pour l’intégration des cultures et des langues régionales dans
l’enseignement et dans les médias qui révélent de la Communauté
Wallonie-Bruxelles.
III
MOTION
RELATIVE A LA SIGNATURE PUIS A LA RATIFICATION PAR LA BELGIQUE DE LA
CHARTE EUROPEENNE DES LANGUES
REGIONALES OU MINORITAIRES
considérant
que le décret de la Communauté française de Belgique
du 14 décembre 1990 relatif à la protection et à la promotion des
langues régionales endogènes est en parfaite concordance avec la charte
européenne des Langues régionales ou minoritaires ;
qappelant
que le Conseil des Langues régionales de la
Communauté française de Belgique a fait connaître à de multiples
reprises son souhait de voir cette Charte signée et ratifiée par la
Belgique, que ce Conseil a fait depuis longtemps des propositions
concrètes en ce sens au Gouvernement fédéral et que de nombreux pays de
l’Union Européenne ont signé cette Charte et l’ont ratifiée à ce jour,
remplissant ainsi les conditions d’une entrée en vigueur dudit
document ;
signalant
que le Conseil international de la langue française a
voté une motion par laquelle il souhaite que tous les pays francophones
concernés signent puis ratifient cette Charte ;
l’Union Culturelle Wallonne, réunie en Congrès
statutaire et
d’orientation ce 12 avril 2008, à
Ottignies
requiert
la signature puis la ratification par la Belgique de
la Charte européenne des Langues régionales ou minoritaires ;
réclame
une intervention de la Communauté Wallonie-Bruxelles
en ce sens auprès des autorités fédérales, afin de voir concrétiser
ainsi sa dernière déclaration gouvernementale sur ce sujet.
IV
MOTION CONCERNANT LES MEDIAS
Constatant objectivement
Le
peu de place réservé aux langues régionales de Wallonie dans le paysage
audiovisuel de la Communauté Française de Belgique. En effet :
• en radio, si l’on peut constater une amélioration
des émissions de la R.T.B.F. en décrochage régional, ces émissions
souffrent toujours d’une attribution très défavorable des créneaux
horaires, du manque flagrant de moyens financiers et même, pour
certaines d’entre elles, du minimum requis de moyens humains ;
• en télévision, s’il y a une amélioration dans la
production de « Wallons Nous », les langues régionales de Wallonie
restent toujours absentes du quotidien télévisuel des Wallons ;
• en matière de télévisions communautaires, si l’on
décèle un intérêt nouveau pour certaines activités et l’une ou l’autre
expérience intéressante, la majorité des centres ne remplissent
aucunement leur rôle de « télévision de proximité » en valorisant
l’existence des langues régionales de Wallonie.
• dans le secteur des radios locales, on connaît une
diversification d’émissions dans l’ensemble de la Wallonie.
Alors que les langues régionales bénéficient dans la
plupart des pays d’Europe de plages-horaires importantes, le wallon, le
picard, le gaumais et le champenois, sont mal diffusés cependant que la
vie culturelle est riche d’événements qui mériteraient d’être captés et
diffusés.
Le Congrès
Estime
que
la diffusion des langues régionales de Wallonie dans les média est
encore marginalisée.
En conséquence, le Congrès
Charge
les
instances de l’Union Culturelle Wallonne :
• de poursuivre les contacts avec la R.T.B.F. et les
stations privées afin de les senssibiliser à l’utilité et aux bénéfices
de la diffusion d’émissions en langues régionales de Wallonie ;
• de poursuivre les contacts avec la R.T.B.F., la
Fédération des Télévisions locales et les stations privées afin de les
sensibiliser au travail conséquent fait d’initiative par les autres
télévisions d’Europe dans la diffusion et la promotion des langues
régionales ;
• d’améliorer sans cesse la collaboration établie
avec la presse écrite.
V
MOTION CONCERNANT LES MEDIAS
Si l’Union Culturelle Wallonne entend
prendre en charge la défense des parlers wallons et de la culture
régionale, c’est parce qu’elle souhaite que les Wallons soient
Européens de « quelque part ».
Le Congrès :
décide
de poursuivre son action au sein de l’Association
internationale pour la Défence des Langues et des Cultures Menacées
(A.I.D.L.C.M.) du Comité International des Fédérations du Théâtre
Amateur (C.I.F.T.A.) et de l’Association Internationale du Théâtre
d’Amateur (A.I.T.A.), afin d’y affirmer l’existence de la Wallonie,
d’y montrer la culture et les créations de notre région, de
contribuer à la construction de l’Europe des cultures et des
diversités, seule garante de la paix et de la démocratie ;
souhaite
que le Commissariat général aux Relations
Internationales de la Communauté française de Belgique (C.G.R.I.)
amplifie son aide pour la promotion de nos créateurs dans le
monde ;
que, conformément aux directives européennes en
matière de langues et cultures régionales et minoritaires, l’avenir
de nos langues régionales soit mieux pris en compte par les
instances de l’Union européenne.
VI
MOTION CONCERNANT LES POUVOIRS PUBLICS
Le Congrès
réclame
des pouvoirs publics en général, pour les
domaines entrant dans leurs compétences et pour les territoires
placés sous la juridiction, une action volontariste et ferme en
faveur de l’utilisation et de la mise en valeur des langues
régionales de Wallonie.
Le Congrès
exige, en particulier,
Une action permanente des
pouvoirs publics de tous les niveaux :
-
pour que l’emploi des langues régionales,
dans tous les domaines de la vie des hommes, soit enfin reconnu
comme valeur culturelle à part entière ;
-
pour que le wallon, le picard, le gaumais et
le champenois s’inscrivent clairement comme parties intégrantes
du patrimoine de la Wallonie et puissent bénéficier du même
respect, du même souci de préservation et de promotion, de la
même volonté d’étude scientifique que les autres facettes de
notre patrimoine, tout en tenant compte de cette particularité
évidente, qu’il s’agit d’un patrimoine immatériel mais vivant.
-
pour que les décrets du Conseil de la
Communauté française de Belgique des 2 février 1983 et du 14
décembre 1990 bénéficient d’avantage d’applications sans
lesquelles ils ne peuvent rester que des textes symboliques de
la volonté politique d’un moment ;
-
pour que le Conseil des Langues Régionales
Endogènes – à l’instar des autres Conseils Supérieurs
Consultatifs – soit confirmé dans son indispensable rôle d’avis,
et que ceux-ci soient suivis d’effets ;
-
pour que l’utilisation des langues régionales
de Wallonie par les autorités politiques abandonne l’aspect trop
souvent limité au seul folklore, et s’inscrive dans une
recherche de qualité de la langue par consultation
d’associations ou de personnes-ressources ;
Le Congrès
réclame, avec force, des pouvoirs publics issus à
tous les niveaux du choix démocratique des citoyens et fonctionnant
grâce aux deniers publics un efficace soutien à l’action permanente
de l’Union Culturelle Wallonne et de ses composantes pour la
concrétisation du Projet Culturel Global qui veut engager le peuple
wallon dans la pratique de sa culture particulière.
VII
MOTION CONCERNANT L’ENSEIGNEMENT
Prenant comme référence
les travaux de pédagogie et de psycholinguistique
qui font autorité et dont les conclusions confirment depuis
longtemps le bilinguisme langue véhiculaire/langue régionale comme
un élément essentiel prédisposant à l’apprentissage d’autres
langues, ainsi qu’au développement intellectuel et social de
l’enfant.
Le Congrès
réclame
de tous les Pouvoirs et des Partenaires une
attention très particulière à l’intégration de la langue régionale
endogène, outil de développement intellectuel, linguistique et
culturel, dans le processus éducatif des enfants et des adolescents,
ainsi que dans la formation de jeunes adultes ;
s’adresse
particulièrement
Au Ministre de l’Enfance et de l’Enseignement
fondamentale pour qu’il adopte enfin une attitude générale conforme
à la volonté des wallons d’intégrer leur langue régionale dans leur
développement culturel ;
de manière générale
au même Ministre et à sa formation politique pour
qu’ils marquent clairement leur volonté d’aller dans le sens des
nombreuses initiatives des gouvernements démocratiques européens
quant à la reconnaissance et la promotion des langues régionales,
particulièrement dans l’enseignement ;
demande
avec une extrème inistance que conjointement à
l’introduction prônée d’un bilinguisme obligatoire dans
l’enseignement primaire, soient enfin mis en application, par des
mesures et des moyens adaptés, les dispositions des Décrets du 2
février 1983, du 14 décembre 1990 ainsi que du récent décret de
juillet 1998 relatif aux Arts de la Parole dans les Académies de
Musique et dans l’Enseignement Secondaire à Distance, en s’inspirant
aussi des recommandations déposées par la Commission d’intégration
des langues régionales et ratifiées par le Conseil des langues
régionales endogènes de la Communauté française de Belgique ;
se tient
à la disposition pour un partenariat efficace en
vue d’assurer une maîtrise des langues régionales dans la formation
initiale et continuée des enseignants.
En conséquence, le Congrès :
mandate
les instances de
l’Union Culturelle Wallonne pour poursuivre des démarches opportunes
et suivies auprès des pouvoirs Organisateurs et des organisations
reconnues des parents, des enseignants et des étudiants, tout
niveaux et tout types d’enseignement confondus ;
souhaite
une intervention rapide auprès des Institutions
de formation des futurs enseignants afin d’obtenir l’inscription de
l’apprentissage et de l’exploitation des langues régionales
endogènes dans leurs programmes ;
invite
les responsables des compagnies théâtrales et des
centres régionaux qui assurent des cours de wallon à collaborer en
cvue d’assurer, notamment aux jeunes comédiens, une formation à la
langue en vue d’une communication orale correcte et rigoureuse dans
la langue régionale (qui ne peut se contenter d’être du français
teinté d’ accents picards, gaumais, champenois ou wallons) ;
demande
à tous les membres de l’Union Culturelle Wallonne
de se considérer comme les premiers acteurs de l’apprentissage et de
la transmission des langues régionales dans leur entourage et leur
famille.
propose
aux mandataires politiques membres ou
sympathisants de l’Union de se regrouper dans une association dont
le but serait de défendre l’intégration des langues régionales dans
l’enseignement ;
insiste
pour que les membres de l’Union Culturelle
Wallonne prennent l’engagement de solliciter les pouvoirs de
proximité (communes, provinces,…) pour développer dans leur entité
toutes initiatives favorables à l’apprentissage et à l’usage des
langues régionales, comme les y autorise le décret de 1983.
VIII
ENSEIGNEMENT (bis)
Le Congrès :
-
constate que, malgré l’investissement d’artistes et de bénévoles
en faveur de la langue wallonne, celle-ci ne cesse de perdre de sa
vitalité et entre dans le processus décrit par les linguistes comme « la
mort des langues »
-
considère cependant, comme le confirment des faits historiques
anciens et plus récents (de l’hébreu en Israël au breton), que
« l’action humaine peut toujours renverser le cours des choses (J.-L.
Calvet)
-
constate à ce sujet que l’avis des plus grands spécialistes est
unanime : si la transmission familiale est devenue un leurre, seule
l’introduction du wallon à l’école peut encore en assurer la survie
-
estime en conséquence qu’il serait normal et souhaitable que la
Communauté Française responsable de l’enseignement mette en place avec
des personnes compétentes un groupe de travail devant aboutir à
l’instauration d’un cours de wallon à l’école
-
fait confiance au Ministre-Président de la Communauté Française,
qui a exprimé récemment son sentiment d’appartenance à sa communauté,
pour prendre en compte notre demande.
En conclusion :
La perte de vitalité de la langue wallonne est
devenue une évidence : quasi-disparition de la transmission familiale,
diminution des initiatives d’enseignants, diminution du nombre de
participants aux concours scolaires, vieillissement du public des cours
pour adultes, réduction de la place du wallon dans les médias.
Et l’on est bien forcé de reconnaître que les
apparitions publiques du wallon tiennent davantage de soins palliatifs
qu de remèdes efficaces. Le théâtre semblerait peut-être une exception,
mais malgré son succès relatif, il faut reconnaître que le répertoire
est de plus en plus envahi par des adaptations à la langue souvent
approximative et, dans le public et même les coulisses, il est rare
d’entendre un mot de wallon…
Il est donc évident que le wallon est sur la voie du
déclin.
Les ouvrages des linguistes sont nombreux sur le
sujet du déclin des langues, mais ils sont unanimes sur un point : une
action humaine volontariste -donc politique-est toujours capable
d’inverser le cours des choses. La fondation d’écoles où puissent
l’apprendre les enfants à qui elle n’est pas transmise par leur milieu
familial reste toujours possible (Claude Hagège)
L’exemple de l’hébreu, devenu langue d’Etat, est
évidemment spectaculaire et personne n’envisage que le wallon devienne
langue officielle ! Mais on peut en tirer bien des enseignements pour la
sauvegarde d’une langue, et notamment l’échec d’une volonté de rétablir
la transmission familiale. En revanche, la pratique de la langue dans
l’enseignement sera couronnée de succès, à commencer par les jardins
d’enfants.
Dans ce domaine, les témoignages de linguistes
renommés abondent pour dire l’importance du bilinguisme précoce, le fait
que plus on parle de langues, plus on éprouve de facilité à en
apprendre d’autres (M.Yaguello)
C’est également chez cet auteur que l’on trouve cette
mise en garde que bien des Wallons devraient méditer, ceux-là qui se
disent trop volontiers « fiers d’être Wallons » sans poser aucun acte
concret : Quand les gens se sentent obligés de proclamer qu’ils sont
fiers de leur langue, il y a des raisons de s’inquiéter pour la langue
en question (…) Est-ce qu’on entend jamais un Américain se proclamer
fier de la langue anglaise ? »
Il serait donc urgent que les responsables politiques
de l’enseignement prennent conscience que c’est sur eux que pèserait le
reproche des générations futures de n’avoir rien fait pour que le wallon
survive.
Les circonstances paraissent d’autant plus favorables
à une décision hardie que l’avenir de la Belgique est incertain et que,
pour la première fois, un homme est à la tête de la Communauté
Française, responsable de l’enseignement, et de la Région Wallonne,
symbole de son identité.