Cocorico

1 Du bilinguisme wallon Magazine TRIMESTRIEL N°67 / 4ème trimestre 2023 Le numéro 2,50 € Expéditeur : Paul Lefin UCW / Rue Surlet, 20 4020 LIEGE BUREAU DE DEPOT LIEGE X / N°agr. P601169 België-Belgique PB-PP 9/2809 COC RICO Clapante année 2024! Qu'elle vous apporte toutes sortes de bonheurs!

2 Coc rico Magazine Le journal du bilinguisme wallon Editeur responsable : Paul LEFIN 04/3426997 Rue Surlet, 20 4020 Liège Trimestriel tiré à 4000 ex. Avec l’aide de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de la Région Wallonne. Avec le soutien du Conseil des langues régionales endogènes Numéro d’entreprise : 478.033.816 Siège Social et Rédaction : Rue Surlet, 20 4020 LIEGE 04/342.69.97 E-mail : secretariat.ucw@gmail.com URL: www.ucwallon.be Comité de rédaction : Monique TIERELIERS Sabine Stasse Joseph BODSON Michel HALLET Bernard LOUIS Johan viroux Imprimerie AZ PRINT : 6, rue de l’Informatique 4460 Grâce-Hollogne Tél. 04/364.00.30 ABONNEMENTS 4 numéros par an : 10 € BE90- 0012-7404-0032 de UCW éditions Soutien du Ministère de la Communauté française, en particulier celui de la Direction générale de la Culture – Service général des Arts de la Scène – Service Théâtre Hommage Jean-Marie Mottet C’est à la suite de son parrain, le durbuysien Edouard Seret, que Jean-Marie s’est lancé dans la défense de la langue et de la culture wallonnes. Il voyait en lui un modèle à suivre, un poète de grande classe certes, lui qui présidait aux destinées de la Fédération wallonne littéraire et dramatique de notre province. Dès 1974, il y aura donc bientôt 50 ans, j’entrais dans l’entourage de Jean-Marie. Et donc dans celui de cette Fédération qui lui était si chère. Il en était devenu le président, il lui fallait un secrétaire. Il n’a pas dû chercher bien longtemps. Toutes les qualités qu’on connaissait à Jean-Marie tant dans sa vie familiale que professionnelle, on les observait aussi dans sa vie de loisirs, culturels entre autres. Que de réunions, provinciales ou interfédérales, présidées de main de maître, avec toujours cette sorte de fermeté mais aussi cette écoute attentive, le petit sourire au coin des lèvres qui en disait long à qui savait y lire ce qui convenait ! Que de cercles dialectaux visités, en jury ou ailleurs, avec toujours ce grand respect du travail accompli sur les planches ! Que d’idées défendues bec et ongles pour que ne se perdent pas dans un oubli irréparable ce que nous appelons un peu pompeusement parfois nos « langues endogènes », notre culture wallonne, bref nos racines authentiques !

3 Ène bèle djoûrnéye pou l’tèyâte walon pou nos-èfants ‘yèt djon.nias Ce samedi 9 septembre 2023, dans le cadre des fêtes de Wallonie à Charleroi, Èl Môjo dès Walons organisait une journée consacrée au théâtre en wallon pour enfants et adolescents, en partenariat avec la ville de Charleroi, au palais des Beaux-Arts, dans la magnifique salle des Congrès. C’est par un colloque qu’a débuté cette magnifique journée. Évidemment, le thème proposé était : « Qu’en est-il du Théâtre wallon pour enfants et adolescents ? ». Et c’est donc à l’Union Culturelle Wallonne que Jean-Marie aura trouvé la vraie dimension de son action. Il l’a présidée à plusieurs reprises, avant d’en être un vice-président et un administrateur assidu. Ses avis y étaient toujours écoutés parce qu’éclairés, ses commentaires étaient toujours réfléchis, mais aussi toujours bienveillants. Authentique Durbuysien, il connaissait la valeur de ses racines et ce sont ces racines mêmes qui guidaient toute l’action qu’il a menée au sein des associations qui assurent aujourd’hui encore la défense de l’âme et de la culture wallonnes. Pour tout cela, pour l’amitié partagée dans la bonne humeur, pour ta foi en l’homme et en ses valeurs, nous te disons MERCI, Cher Jean-Marie ! Christian ROBINET Vice-président de l’Union Culturelle Wallonne

4 Plusieurs questions en relation avec le thème ont été abordées : - Est-ce que les enfants pratiquent encore la langue wallonne ? Et quelles en sont les approches ? - Quelle est la première motivation des enfants à s’orienter vers le théâtre en wallon ? Le théâtre wallon est-il une suite logique après les concours de récitations, l’école, les ateliers ? - Comment pérenniser la présence d’ados et d’enfants dans nos troupes dialectales ? C’est l’échevine Babette Jandrain qui a accueilli les participants à cette manifestation. Après le mot d’accueil par Michel Robert, le président dèl Môjo dès Walons et modérateur des débats, les participants à ce colloque, devant un public intéressé et prêt à intervenir également, mais pas assez nombreux ; Joelle Spirkel , Claudine Franceschini, Jeannine Hansenne, Julien Noel, Pol Soumillon, Roland Thibeau ont débattu pendant plus de deux heures. Il en résulte qu’après les concours de récitations et les cours de wallon à l’école, fussent-ils éphémères, le théâtre en wallon conduit nos jeunes vers la langue wallonne. Les enfants sont réceptifs à apprendre une nouvelle langue y compris le wallon. Leur facilité à comprendre et à parler sont à souligner. Il est plus facile d’apprendre à parler wallon à des jeunes qu’à des adultes. Ils évoluent plus rapidement. Les personnes dévouées à la cause de notre beau langage usent de stratégies inventives et ludiques afin que nos enfants s’épanouissent d a n s l’apprentissage d’une langue qui pour la plupart sommeillait en eux puisqu’elle est inscrite dans leurs gènes , leur patrimoine. Les lectures, la diction, les adaptations scéniques, etc. demandent un travail constant, avec deux voire trois répétitions semaine. Ces tâches sont accomplies par de bonnes volontés, souvent les mêmes. Pas de relèves ou peu à l’horizon … ce sont les bras qui manquent pour éduquer nos jeunes. Pour que nos enfants s’intéressent davantage au théâtre en wallon, il faudra compter sur la créativité et le talent de nos auteurs. Difficile d’évaluer le pourcentage de ces jeunes qui après leur adolescence continuent dans des troupes wallonnes. Assurément, il y en a ! Et la tendance évoluerait favorablement.

5 La survie du wallon et par définition du théâtre en wallon passera par notre jeunesse. L’école, les ateliers, la présence des parents et grands-parents dans des activités intergénérationnelles seront déterminants. Après une pause, rendez-vous fut pris pour de visu se rendre compte de l’évolution et du travail réalisés par de jeunes c omé d i - ens. A 14h, le public était au rendez-vous pour assister à trois représentations théâtrales pour enfants et adolescents. En amont, la fédération culturelle wallonne et picarde avait organisé un concours de pièces de théâtre pour nos jeunes. Plusieurs auteurs avaient répondu à l’appel. Le premier prix a été remporté par In drôle di procès, de Léon Hansenne. 2ème prix, ex æquo, les chwèsis de Michel Robert et Marène de Philippe Decrau et Michel Vander Plaetse. Quant au 3ème prix, il a été remporté par A scole, de Pascal Heringer. C’est sans aucune retenue que les spectateurs ont applaudi les jeunes de Courcelles et de Gerpinnes. Ces derniers ont fourni des prestations de haut niveau dans des pièces originales. Bén djouwès lès djon.nes èco grâce bran.mint dès côps ôzès dèvouwès d’awè montès dès spèctâkes di qualitè. Michel Robert

6 L'Union Warnantaise fête ses 100 ans. À cette occasion, une exposition rétrospective a été mise sur pied et un programme de festivités commémorant le centenaire a été élaboré. L'asbl fut fondée en 1923 par quelques amoureux d'art dramatique pour divertir sainement le village. En 1926, la première salle des fêtes de la troupe fut inaugurée. Pour le centenaire de la Belgique, une pièce de circonstance « Li Rèvolucion di 1830 » vit le jour. Pendant la guerre 40-45, neuf spectacles furent présentés, qui permirent de réaliser les colis du prisonnier. Après la guerre, l'Union quitte la Maison des œuvres de la paroisse où elle jouait ; ses membres achètent un terrain et font bâtir une nouvelle salle qui sera inaugurée le 9 novembre 1952. (En 2000 la commune la rachètera et l'agrandira). À partir de 1957, la Troupe participe au Grand Prix du Roi Albert. Elle gagnera la coupe en 1959, à Nivelles, avec « César » et en 1974, à Freux, avec « On a kidnappé grand-mère », sous la direction de son secrétaire de l'époque, Jules MARCHAL. Elle sera deux fois 2ème et participera onze fois au Tournoi. L'Union est devenue « Royale » ; elle a aussi obtenu la Gaillarde d'Argent du Comité central de Wallonie. Elle a interprété 4 pièces pour la télévision et une soixantaine d'autres pour la radio. Elle a donné une représentation au Palais des Beaux-Arts en présence de plus de 2000 La Troupe actuelle L'inauguration de la salle en 1952 Société « Royale » en 1973

7 Les festivités du centenaire spectateurs dont la Reine Élisabeth. Elle a participé au Festival de Théâtre wallon de Ciney. On estime le nombre total de pièces représentées à plusieurs centaines, avec les représentations à l'extérieur. Le Covid n'a pas eu raison de la Troupe. Grâce à Christian CARLY, metteur en scène, Pierre GOFFIOUL et Claude CARLY, secrétaire-trésorier, l'Union a repris son cours en mai 2022 pour entamer un nouveau siècle d'existence. Par ailleurs, des cours de wallon sont aussi prodigués dans la commune (Anhée). BL

8 À VOS PLUMES, À VOS CLAVIERS ! Prix de la Ville de La Louvière 2024 Nous voici arrivés à la sixième édition de notre concours biennal. Notez bien que, au nom de l’alternance, il sera dédié, cette année à la prose. Nous vous invitons à (re)découvrir le règlement cidessous et vous remercions de bien vouloir le transmettre Urbi et Orbi. - Un concours littéraire en langues régionales endogènes intitulé « Prix de la Ville de La Louvière » a été créé à l’initiative de l’association littéraire Lès Scriveûs du Cente et du Centre Culturel Régional du Centre. Ce concours est ouvert aux langues régionales endogènes romanes de la Région wallonne (wallon, picard, champenois, gaumais…) et s’adresse alternativement aux poètes et aux prosateurs. Cette année : PROSE. - Les œuvres seront présentées en cinq exemplaires ; elles seront dactylographiées avec soin ou imprimées ; elles ne pourront avoir fait l’objet d’aucune récompense et devront être inédites ou avoir été publiées après le 31 décembre 2021. - Les textes seront traduits en français ou suivis d’un glossaire aussi complet que possible. · Les traductions et adaptations d’œuvres existantes, écrites par un autre auteur, dans une autre langue ne seront pas prises en compte. - L’emploi de l’orthographe Feller est souhaité. - Les œuvres seront envoyées ou déposées contre accusé de réception au secrétariat des Scriveûs du Cente : Christian QUINET, 20 rue de la Résistance – 7100 La Louvière pour le 15 mai 2024 au plus tard. Le participant indiquera clairement ses nom, prénom et adresse complète. - Les lauréats des éditions précédentes sont autorisés à se représenter au concours. - Un jury de cinq membres est désigné par les Scriveûs du Cente et le Centre Culturel Régional du Centre. Ce jury se réunira au-delà du 15 mai afin de délibérer après examen des œuvres présentées. - Un prix d’un montant de 1500 (mille cinq cents) €, don des Scriveûs du Cente, sera attribué au vainqueur du concours ; un second prix d’un montant de 750 (sept cent cinquante) € sera attribué par la Maison de la Culture de La Louvière. La remise des prix et la proclamation complète des résultats auront lieu en septembre 2024, dans le cadre des Fêtes de Wallonie, à La Louvière. Tout cas non prévu par le présent règlement et toute contestation née de son application seront tranchés sans appel, sur rapport du jury, par les Scriveûs du Cente et le Centre Culturel Régional du Centre. Bien fraternellement ! èl Mouchon d'Aunia.

9 Prix Émile Lempereur 2024 Prix de langues régionales endogènes romanes de la Fédération Wallonie-Bruxelles organisé par la Ville de Châtelet Article 1 Il est instauré par la Ville de Châtelet, en collaboration avec l'asbl Èl Môjo dès Walons, le Prix Émile Lempereur destiné à récompenser une œuvre littéraire rédigée dans une des langues régionales endogènes romanes de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Ce prix est d'une valeur de 2500 euros. Article 2 Ce prix sera décerné à partir de 2023 et récompensera des créations inédites ou rendues publiques depuis moins de deux ans. Article 3 L'attribution de ce prix sera confiée à un jury composé de cinq membres désignés par la Ville de Châtelet. Article 4 Le jury est seul compétent pour juger de la recevabilité des travaux présentés à son examen. Pour ce qui concerne les textes rédigés en wallon, le système de transcription mis au point par Jules FELLER sera exigé ; pour ce qui concerne les autres langues régionales, à savoir le champenois, le picard ou le lorrain, ce système sera recommandé. Article 5 Le prix ne pourra récompenser durant deux années consécutives un même candidat. Article 6 Les travaux soumis au jury devront lui parvenir en six exemplaires impérativement avant la date fixée dans l'appel à candidatures. Les exemplaires déposés seront conservés par les membres du jury et un exemplaire sera mis en dépôt à la Bibliothèque communale Henri Matelart. Article 7 Les propositions du jury seront élaborées à la majorité simple et elles seront transmises aux autorités communales de la Ville de Châtelet pour entérinement. Article 8 Un agent communal assistera à la réunion du jury mais ne participera ni aux débats ni au(x) vote(s). Article 9 Tout cas non prévu par le présent règlement et toute contestation née de son application seront tranchés sans appel, sur rapport du jury, par les autorités communales de la Ville de Châtelet. Règlement arrêté par le Conseil communal du 03 février 2023. Renseignements pratiques pour 2024 Les ouvrages doivent parvenir avant le 31 mars 2024 à l'adresse postale suivante : Èl Môjo dès Walons c / o Aude ANTOINE, rue a. Paganetti 11 A, B. 6280 Gerpinnes.

10 Après le Luxembourg, continuons notre tour des provinces avec le Brabant, « li Roman Payis », terre de mes grandsparents maternels, des « Brèbonîs » (ou « Brabançons »). Penchons-nous sur les groupements et les manifestations qui portent un nom dans la langue d’origine. (Rappelons que les dénominations reprises sont écrites en wallon avec les corrections orthographiques qui s’imposent. Les localités sont mentionnées dans la langue originelle la première fois qu’elles sont citées. La graphie « ë » n’a pas été conservée. Elle représente une variante locale (un allophone) du son (phonème) écrit « i » (prononcé comme le /I/ anglais). Néanmoins, cette lettre est ci-dessous en italique pour ne pas dérouter les personnes habituées à la graphie « ë » … et en souvenir de mes origines ! Le digramme (assemblage de deux lettres) « én » est utilisé localement comme une variante d’« in ». Dans ce cas, « i » sera aussi écrit en italique.) 1 Sur le plan culturel Les études approfondies du professeur Jean-Jacques Gaziaux (Jodoigne / Djodogne) (plus de 2000 pages !), d’Alphonse Massaux (Dion-le-Val / Djonl’-Vau) et de Joseph Coppens (Nivèle / Nivelles) constituent le fer de lance de la connaissance linguistique de la région. La littérature est riche, notamment avec trois auteurs de Nivelles (Nivèle), l’abbé Michel Renard (avec une épopée de « Djan d’ Nivèle » en plus de 2000 rimes) (dont une rue possède le nom), le grand poète Franz Dewandelaer (une plaque commémorative, le nom d’une allée, voire d’un sentier, cette fois à Louvain-la-Leuve (Li Noû-Lovin)) et Georges Willame (un monument a été érigé en sa mémoire). Il faut ajouter des écrivains de talent comme Jacques Desmet (« Maujeni »), Pierre Surkol, … Dans le domaine théâtral, pas moins de 7 troupes ont été relevées, dont 3 avec une dénomination wallonne : « Èl Rwèyâle Nouvèle Gavote » (Nivelles), « Lès Longuès Pènes » (Tourinnes-la-Grosse / Li Grosse Tourine), « Lès Pas Pièrdus » (Loupoigne / Loupougne) et la troupe du « Téyâte walon » (Rebecq / R’bèk). Une revue littéraire, « Li Nwêr Boton », vient de remplacer « Li Sauvèrdia » (le moineau). Que signifie le titre cité en premier ? Au siècle dernier, pour interdire le wallon dans les écoles, sur ordre de l’inspection, les enseignants utilisaient comme torture psychique notamment un bouton (noir, …) remis à un enfant pris à utiliser cette langue. Ensuite, ce dernier s’empressait de le refiler à un condisciple dès que celui-ci commettait le même « crime ». Le dernier de cette série de délations recevait une punition, devait rester en classe après les cours, … A Nivelles, « Rif tout djus » est une revue contenant parfois des textes en wallon et Tchin.ne dès Walons (2) Li Roman Payis

11 « L’Aclot » (« Aclots », le surnom donné aux habitants de Nivelles) est un journal publicitaire. Au niveau musical, « Vîve Djan-Djan » est le chant populaire dans cette cité, joué au carillon de la collégiale SainteGertrude (Sinte-Djèdru), où se trouve le jacquemart* surnommé « Djan-Djan » (Jean de Nivelles). (*Un jacquemart est un automate figurant un homme d'armes muni d'un marteau avec lequel il frappe les heures sur la cloche d'une horloge monumentale.) Son air fait par ailleurs partie du répertoire des « baterîyes » (groupes de fifres et de tambours) dans les marches folkloriques de l’Entre-Sambreet-Meuse. Nous n’oublierons pas Julos Beaucarne, citoyen de Tourinnes-laGrosse, célèbre compositeur, notamment de « Lès djins dè ç' costé-ci » (une chanson à réentendre sur internet – les paroles défilent sur la vidéo en wallon et en français). A Ottignies (Okenî) existe un groupe de danseurs et de danseuses appelé « Lès Vîs Tchapias dè Stimont » (« vî tchapia », littéralement « vieux chapeau », signifie plaisamment « personne âgée » (les participants sont toutefois de tout âge) ; Stimont est un quartier de cette ville). Le folklore est assez bien développé dans cette province et même en plein essor. Parmi les groupes carnavalesques portant un nom wallon se trouvent « Lès Mineûs d’ Arèdje », « Lès Macrales », « Amon nosautes » (tous trois à Hélécine / Hélècine), « Lès Grossès Tièsses » (Wavre / Auve) et six sociétés de gilles à Nivelles (ceux de l’« Apèrtintaye », de l’« Argayon », de l’ « Èspontaule », « Lès-Inradjis », « Lès Mitans d’ Djan-Djan » et « Lès Rif tout djus »). A Louvain-la-Neuve, le carnaval du « Blanc Tch’vau » se base sur une légende homonyme. De nombreux géants égaient les défilés : « Li Maka » et « Mèlîye » (Basse-Wavre / Basse-Avue), « Au Pièrdu » (Baulers / Baulé), « Djôsèf, èl Fwachî d’ Cout » et « Dolfine » (Court-Saint-Etienne / Cout), « Gusse du Flamind » et « Rôsine » (Genappe / Gngnape), « Marîye Crayeû », « Télèsfôre Blanc-Djilèt » et leurs enfants « Gusse » èt « Jiji » (Grez-Doiceau / GréDwècha), « Max d’ amon nos-autes » (Hélécine), « Dofe » et « Dolfine » (Ittre / Ite), « Piêre di Tchèssaut » (litt. de Chassart) (Marbais / Marbé), « Li Cagne » (Nethen / Nèt’); l’« Argayon » (litt. géant), l’« Argayone » et leur bébé, « èl Lolô », « sinte Djèdru », « Djan-Djan » (Nivelles) ; « Lèyon Tautî, Marîye Amand, Kiki, Bèbèl, Fricat » (Ophain / Opin), « Adèle, Mitchî, Djan dè Marèt » (Orple-Grand / Ôr-Grand), « Fine di Sirou », « Tâve di Stimont », « Rousemarin » et les « Briketîs » (Ottignies), « Frèd da Pagni » (Tourinnes-la-Grosse), « Minîye Chichile » et « Napolèyon, èl Rèmouleû d’ Cisètes » (Tubize / Tubise), « Li Crapôde » (Wavre), « Marîye Doudouye » (Villersla-Ville / L’ Abi). A Hamme-Mille (Hame-Mële (Mële se dit aussi M’lin)), la kermesse s’appelle « li fièsse à M’lin ». Lors de celle organisée à Marbisoux (Mamejou), on peut voir défiler les « Pèlèrins ». En matière de gastronomie, les tartes brabançonnes connues bien au-delà de cette province sont la « tarte à l’ djote » de Nivelles et la « blanke dorèye » de Jodoigne. Les confréries du « Stofé » (Wavre), des « Mougneûs d’ Vète Tripe » (Orp) et des « Blancs Djilèts Mougneûs d’ Hatchis’ » (Grez) font chacune la promotion d’un produit local.

12 Soutenez l’action de l’Union Culturelle Wallonne en rejoignant les quatre mille abonnés de COCORICO Magazine du bilinguisme wallon 4 numéros par an : 10,00 € A verser sur le compte BE90-0012-7404-0032 de l’UCW Editions A Basse-Wavre a lieu chaque année une procession, le tour de Notre-Dame, avec un « fî » (une châsse), se terminant notamment par la bénédiction du « wastia » (litt. gâteau), une sorte de pain orné de fleurs, transporté sur la tête d’une personne, et son partage entre les pèlerins. Des monuments ont un nom wallon : à Wavre, le « Maka », représentant « l’ arsouyerîye dès djins d’ Auve, spotés lès Makas » et, près d’une fontaine, la « Crapôde » ; à Nivelles, quatre canons, l’ « Inradjî », l’ « Èspontaule », « Broke à l’ Aye » et « Rif tout djus » ainsi que la statue d’« Èl Djandjan » ; les statues de « Twène » (Toine, càd. Antoine) à Jodoigne, symbolisant l’enfant espiègle, et des « Vîs Tchapias » (Ottignies) (litt. personnes âgées mais les danseurs représentés sont jeunes…). 2 Sur le plan social Récemment, des tables de conversation ont vu le jour çà et là, à Beauvechain (Bauvètchin), Grez-Doiceau, Orple-Grand, Perwez (Pèrwé), Ramillies (Ramiéye), Tourinnes-la-Grosse. Il existe des comités locaux avec une appellation wallonne : les « Djins d’ Mélin » (Mélin) et « Amon nos-autes » (Neerheylissem / Hélècine). L’association Wallonie-Wisconsin entretient des liens étroits avec les Américains du Wisconsin restés wallophones et leurs descendants. La commune de Beauvechain est sur le point de placer des panneaux avec des noms de rue en wallon. Quelques noms d’associations sportives : « L’ Argayon » (club de tennis, de squash et de padel) (Nivelles), la société de tir du « Djèrau » (litt. geai) (Marbais) et « Èl Botroule dè l’ Brabant Walon », s’occupant d’un championnat de mini-foot avec 26 équipes et près de 400 affiliés. Il faut aussi ajouter le rallye annuel à Ottignies, le « VTT dè l’ Botroule ». A Hamme-Mille, un sentier de promenade est appelé « Promenâde d’ Ame èt di M’lin. » Trois salles wallonnes : « ‘L Focsal » (le Vauxhall) à Nivelles, « Lès Vîs Tchapias » à Ottignies et celle du « Wastia » à Wavre. Une résidence, « Nos Tayons » (Nivelles). Un café multimédia au centre culturel de Beauvechain, « A l’ Boutroule d’ Ame » (litt. … d’Hamme(-Mille)), suivant son site internet, un « espace ouvert pour regarder au-delà de son nombril » ! 3 Sur le plan économique Une bière, « Djan d’ Nivèle », se déguste dans la région de Nivelles, ville où la « tarte à l’ djote » peut être mangée au « Bar à Djotes ».

13 A Folx-les-Caves (Fau(-lès-Cauves)), on trouve un café, « Amon l’ Kètch » (chez …, un surnom), à Virginal (Vèsenau), une épicerie, « Au p’tit Vèsenau », un restaurant à Ottignies, « À l’ Boutroule », un autre à Wavre, « Lès Makas », deux campings, « À l’ Vau » (dans la vallée) à Nil-Saint-Vincent (Ni) et « Lès Tiènes » (les côtes) à Hamme-Mille. Enfin, une salle de réception, « L’Argayon Business » (Nivelles) et une brocante, celle du « Wastia » (Wavre). Conclusion Répétons-le, si l’on ajoute ces données à celles provenant des autres provinces wallonnes, le bilan peut s’avérer impressionnant. Tout ceci mérite d’être englobé dans un ensemble, « one Tchin.ne dès Walons » et d’être développé. Li walon è-st-one langue qu’ a 4 dialèkes avou 43 sons èt diftongues, ça vout dîre 7 dipus qu’è francès. S’ on studîye li fonolojîye, li morfolojîye, li sèmantike èt l’ sintacse do walon, èt s’on r’mèt tot ça avou lès langues autoû d’lèye, èt surtout l’ francès, on s’ aporçût qu’ gn-a bran.mint d’pus d’ difèrinces qu’ on crwèt : 36 di bâse en fonolojîye, 47 en morfolojîye, 49 en sèmantike èt ... 334 po l’ sintacse. On profèsseûr di l’ULG, Léon Warnant, a min.me trové qui l’ walon aveut d’pus d’ mots avou one sillâbe qui l’ anglès! L’ intèrlingwistike, qu’ a stî lancîye pa on Danwès, Otto Jespersen, pêrmèt èto d’ vôy ci qu’ raprotche li walon d’s-ôtès langues dipus qui l’ francès. C’ èst sûr,- èt l’ histwêre li mostère bin -, qui l’ walon, qui s’ trouve tot près do néerlandès èt d’ alemand, a stî influwincé pa cès langues-là. L’ anglès, li grande soû jèrmanike, a dès traîts lingwistikes qui r’chonenut au walon. Insi, en fonolojîye, au c’mincemint do mot, on trouve dès combinaîsons come en néèrlandès (sn-: snazer - sneeuw; zw-: zwèper - zwart; ...), en-anglès (dj-: djurer - judge; skw-: skwêre - square; ...) èt en-alemand (chl-: chlin - Schlange). En morfolojîye, ‘rosti’si dîrè ‘roosteren’ en néerlandès, ‘lèpe’ ‘lip’ po ‘rôtir’ èt ‘lèvre’ è francès. ‘Ci meur-ci èst 10 mètes hôt’, ‘deze muur is 10 meter hoog’,’ce mur a 10 mètres de haut’. L’ adjèctif qu’ èst sû pau nom enanglès n’ èst nin one saqwè d’ drole po lès Walons: ‘a red house’ èst bin ‘one rodje maujone’ (CW), ‘ine rodje mohone’ (EW). ‘To throw away’, c’ èst Le wallon carrefour linguistiques des langues

14 nosse ‘taper èvôye’, ‘to brush away’, ‘broucheter èvôye’, ... On ‘chorsè’ à Bastogne (SW), ci sèrè ‘Schürze’ en-Alemagne (un tablier), ‘sie denken aneinander’, ‘is pinsenut à n-on l’ôte’, ‘chacun pense à l’autre’ (litèralemint en francès: à l’un l’autre). Do Grand-Duché à l’ Islande, gn-a nosse mot ‘famile’ qui s’ prononce tos costés avou l’ son ‘l’. Lès langues scandinâves ont deûs difèrints mots po ‘homme’ è francès, come ‘man’ èt ‘mens’ en néèrlandès, ‘djin’ èt ‘ome’ è walon. Lès langues romanes, bin sûr, come èles vègnenut do latin, si r’chonenut fwârt inte zèles èt, en waîtant l’ vocabulaîre, li conjugaîson, on pinsereut qu’ li walon richone dipus au roumin, à l’ èspagnol, à l’ italyin, au portuguès èt dès pus p’titès langues come li corse, li catalan ou l’ ocsitan, ... qui l’ francès. Nos sèrins pus latins (èt pus jèrmins) qu’ lès Francès! Li latin, leû mére come li nosse, li walon n’ s’ ènn’ a nin d’trop distatchî quand on vèt ‘sorodje’ (ou bia- frére) po sororius (beau-frère), ‘strin’ po stramen (paille), ‘fachî’ po fasciare (emmaillotter), ... Grâce à Jules Feller, li prèmî qu’ a tûsé sérieûsemint à dès régues po scrîre li walon, noste ôrtografîye si raprotche di régues qu’ on vèt tos costés dins l’ monde. Insi, dins l’s-èpronts au grèk èt au latin, li ‘ph’ a stî remplacé pa ‘f’ en danwès, en-èspagnol, en-èstonyin; ‘th’ pa ‘t’ en portuguès, en-italyin, en norvéjyin; ‘ch’ pa-d’vant ‘r’ pa ‘c’ en roumin, en italyin, ... come dé nos-ôtes: tèlèfone, tèyâte, crétyin, ... Come è walon, li son ‘è’ si r’touve dins aritmetica en-italyin, aritmètike, è walon, ... On dit ‘Sbaen’ (Èspagne) en galwès avou sb- au c’mincemint comme ‘sbârer’ dé nos. On Russe prononcerè ‘salade’ come nos-ôtes avou on /t/ au d’bout; onIslandès, ça n’ lî chonerè nin drole qu’ on dîye ‘malade’ avou /t/ pace qui li, i dit bin ‘öld’ avou /t/ mins ‘dagur’ avou /d/ . Foû d’ l’ Eûrope èt d’ sès langues, gn-a dès fénomin.nes lingwistikes qui sont lès min.mes qu’è walon èt ça pout fé avancî li r’chêrche dins li stude dèsunivèrsaus. Po fini, i n’ faut rovyî qu’ on-z-a tapé l’ walon à l’ abat dès dîjin.nes d’anéyes d’ asto. L’ ensègnemint, en pûnichant lès cis qu’ causin.n walon, èt l’ politike s’ ont mètu èchone po r’niyî l’ walon. Asteûre, dins l’ monde, on vèt on ‘reversing language shift’ qui mostère dès djon.nes prèt’s à disfinde leû langue èt leû culture pace qu’on l’zeû a mostré qu’ èlles avin.n dè l’ valeûr. C’ è-st-à nosse toû d’présinter leûs vraîyès valeûrs po qui nos n’ fuchanche jamaîs pus onteûs d’ nos-ôtes! Johan VIROUX

15 André Leleux, Éplénures du timps, el jour i fait son tour, Copeaux du temps, du matin au soir. André Leleux au mieux de sa forme. Une poésie du quotidien ? Bien sûr que oui. Et même du quotidien le plus quotidien, de l’instantané, si vous préférez. Mais à condition, comme disait Goethe, de dire à l’instant qui passe : arrête-toi, tu es si beau. Et nous voilà, comme des gamins au carrousel, à sauter sur nos talons pour essayer d’atteindre la floche, et pour un tour gratuit. C’est tellement meilleur, quand c’est gratuit… Et justement, chez lui, tout est gratuit, sans rien qui pèse ou qui pose. Entendezle plutôt, un de ces bleus matins où le monde vint au monde : au premier jour/ j’aveos onsse rèfes / à c’ matin / i m’in reste foque ein // je n’ sais même pus ch’ést l’ tcheu / j’ cache alfeos après li //lés eautes / dù qu’is seont inveos / dins lés tourmints du vint ? le premier jour / j’avais onze rêves / ce matin / il ne m’en reste qu’un // je ne sais même plus lequel / je le cherche parfois // les autres / se sont enfuis où / dans les tourments du vent ? Ou je me trompe fort, ou nous voilà embarqués dans une belle chantepleure. L’incorrigible gamin qu’il est adore LIVRES NOUVEAUX EN WALLON Une chronique de Joseph Bodson vous mener en bateau, et puis vous laisser languir au milieu de l’étang… sérieux ou pas sérieux ? Il y a aussi en lui l’homme vieillissant, qui sourit, d’un demi-sourire, mais qui n’en pense pas moins. j’ai fait ein pas déhors / foque un pas / dùsque j’alleos acore ? // ein horizeon s’inqueurt padvant mi / l’eaute padrire i s’ délaminte / à quand m’ main su s’n épaule j’ai fait un pas dehors / juste un pas / où allais-je encore ? / un horizon me précède / l’autre derrière se désespère à quand ma main sur son épaule Et ceci, qui suit, qui a le plein goût de l’enfance : au leong de l’ pichinte à mareautes / j’ai croqué treos grosèles / el goût de m’n infance // ej vas ainsin / roste au mitan dés meots / qu’is parlte beau pou qu’in lés dit au long du sentier des maraudes / j’ai croqué trois groseilles / le goût de mon enfance // et je vais ainsi / ivre au milieu des mots / qui plaident pour qu’on les dise. André Leleux n’invente rien. Lamartine l’avait déjà dit : Objets inanimés, avezvous donc une âme ? Mais Alphonse, pour le dire, il a mis son costume des dimanches. André, il sort sur son seuil, en salopette, avant d’apostropher ses rêves, l’horizon, les groseilliers, les tourmentes du vent. Mais c’est toujours du même tonneau. Les poètes, comme

16 les enfants, ont ce don, de faire vivre les choses. Et, il le dit à la fin : toul même assez pétète / pou faire amisse à l’ pétit gins / qu’i vèle su mi. Quand même assez peut-être / pour cajoler le petit enfant / qui veille sur moi. Car notre enfance, elle n’est pas seulement derrière nous, elle est aussi au-dessus, et aussi en-dedans. Nous le verrons ainsi parler à la lune, et nous dire, plus loin, que quand il parle, c’est toujours pour parler à quelqu’un, pour tisser cette fine toile d’araignée qui nous relie à ceux que nous aimons. Le chant plénier alors s’élève, la voix de l’homme qui aime, cette voix qui nous fait, vraiment, hommes, qui nous délivre et nous rehausse : Si t’intinds / au mitan dés barbélés / ein tchant / lés grand-messes du vint // te saras que l’ ciel / ch’é quant ène priseon elle s’éboule / ch’ést quant ein meot i treufe ein geste / el ciel / ch’ést quant l’amour i vint quéquein si tu entends / au milieu des barbelés / un chant / les grand-messes du vent // tu sauras que le ciel / c’est quand une prison s’écroule / c’est quand un mot trouve un geste / le ciel / c’est quand l’amour devient quelqu’un Je pourrais citer bien des passages encore, et vous faire des tonnes de commentaires, que je n’ajouterais rien à toutes ses richesses. Je voudrais seulement vous donner l’envie de le prendre, ce livre, et de le manger, comme on mange de baisers les joues d’un enfant. Deux ou trois vers encore, comme un écho que le vent nous laisse sur son passage, en étrange héritage, et comme l’envie de naître à nouveau, pour une vie nouvelle, une autre vie encore : ej t’écris comme in dminte quoi / à lés neuaches je t’écris comme on questionne / les nuages Mais suivront les Busiries à l’écriène, su tout et rin // in ratindant l’ jour d’après Pensées à la veillée sur tout et sur rien // en attendant demain, ces pensées vespérales sur les jours derniers qui nous restent :mais là dùsque j’finis / à ceulle frantière / inter in d’dins et déhors / inter mi et ti / t’ main elle fait dés miraques. Mais là où je finis / à cette frontière / entre dedans et dehors / entre moi et toi / ta main fait des miracles. Faut-il pour autant désespérer, car lés pichoulis is fannte / min soufe i s’épart / dins dés camptines d’afants les pissenlits se fanent / mon souffle se disperse / en comptines d’enfants. Tout finit, tout se fane, les plaisirs de la vie ne durent guère, et pourtant… l’hasard i serre mal es porte / et l’ sommèle i m’importe / inter deux raminvrances le hasard ferme mal sa porte / et le sommeil m’emporte / entre deux souvenirs. Il y a là comme un écho lointain, dans la simplicité de ces phrases nues, de ces mots sans afféterie, des premiers

17 Franz Dewandelaer Nous n’avons pas encore eu l’occasion d’évoquer, danscette rubrique, l’attachante figure de Franz Dewandelaer, « le » poète nivellois. Pourquoi « le» poète ? Parce qu’aucun, mieux que lui, n’a su évoquer l’atmosphère de cette ville, et les caractéristiques de ses habitants. Et pourtant, Nivelles ne manque pas de bons auteurs wallons, à commencer par Willy Chaufoureau, qui fut longtemps le directeur de la troupe de théâtre wallon « Les XIII ».. De plus, Franz Dewandelaer, n’hésitons pas à le dire, est l’un de nos meilleurs poètes wallons. S’il ne fut pas, de son vivant, membre de la Société de Langue et Linguistique wallonne, c’est bien parce que son franc-parler, et l’âpre critique sociale qui marque ses écrits, le rendaient difficilement « académisable ». Mais avec le temps, cet « oubli » n’a pas manqué d’être réparé, et, en 2003, la SLLW a publié une brochure importante, due à Yvan Dewandelaer, fils du poète, Emile Gilliard, Emile Lempereur et JeanMarie Pierret. Cette brochure nous a été transmise par Jean-Jacques Chapelle, qui a longtemps assuré les cours de wallon à Nivelles. (Pour les non-initiés : les Nivellois sont des Aclots, et le wallon de Nivelles, c’est l’aclot.) Le décès récent d’Emile Gilliard rend d’autant plus actuelle cette brochure, dans laquelle il a vraiment exprimé, me semble-t-il, sa pensée profonde, ou du moins l’un des éléments importants de cette pensée : son attachement au petit peuple, paysan et ouvrier, tel qu’il l’a connu en son village de Moustier, dans la Basse-Sambre, les aléas de sa vie quotidienne, le souci des plus pauvres, des infirmes, et ce que nous pourrions appeler « la simplicité de la vie ». Ce sont là des préoccupations constantes également présentes chez Dewandelaer, Voici, tirés de l’article que lui a consacré son fils Ivan dans cette brochure, quelques faits marquants de la vie de Franz Dewandelaer : Il est né en 1909, dans une famille modeste. Son grand-père, ouvrier dans une miroiterie, ne parlait que le wallon, tout en sachant écrire en français. Son père, Louis, était facteur. Franz était passionné de lecture, et se mit à écrire très tôt, en français comme en wallon. A 17 ans, il a déjà composé de nombreux poèmes, en français et en wallon. En 1927, une première revue, en français. jours de notre lyrisme, de Rutebeuf et de Villon. Et cette poésie, dans sa simplicité, dans sa nudité peut-être est-ce cela, ce souffle d’air échappé par la porte du hasard. Le monde sans fin de l’amour, en ces vers brefs et nécessaires, qui s’avancent à clochepied, sur les sentiers du quotidien.)

18 En 1928, ce sera sa première pièce de théâtre en wallon. En 1934, il trouve un emploi dans l’administration communale de Nivelles. Il épousera une cousine de Charles Plisnier, Marthe, et ils auront deux enfants, Francine et Yvan. Prisonnier en 1940, il créera un théâtre dans son camp. Il sera libéré en 1941, sa santé étant gravement atteinte. Il fondera le Théâtre wallon nivellois, et sera très actif en tant que journaliste et producteur à la radio. Il décédera le 23 août 1952. La poésie de Franz Dewandelaer est profondément marquée par ses origines populaires : proche de la langue populaire, elle est tout entière attachée à ce milieu, et plus particulièrement par sa pitié pour les pauvres, les démunis, les malades. Profondément marquée aussi par sa critique des « mauvais riches » et des puissants qui ne se soucient guère de la misère des pauvres. Ce sera notamment le cas de son poème le plus connu, L’Aveûle, dont nous vous donnons quelques extraits ci-dessous, avec la traduction de Maurice Piron, dans ses « Poètes wallons d’aujourd’hui », parus chez Gallimard en 1961 : « Avè s’ chabraque tout ressârci, / Avè s’ cote qui n’èst pus qu’un pli, / Èle va, in taustant là yèt ci, / Dins l’ pieufe qui r’late, dins l’ vint qui rit, / - Qui brét, qui miâwe, qui tchante, qui r’beûle, - / L’aveûle…// Èt l’pieûve coupe come in tchamp d’èsteûle…// Sès solés sont mwins’ cûr què trôs ; /Sès tchaussètes, cè n’èst pus qu’ dè l’iau ;/ Sès pîds, c’èst dèl glace qui s’ poûrmène…/ Èle crombit s’ dos come ène voûssure, / Ès’ bras yèt s’ baston conte èl mur / Taustont èchène// Èl pieufe qui trawe come claus d’aci / Dèskind toudi, toudi, toudi, /Pa longuès lignes yèt pa fins plis. » (Avec son châle tout ravaudé, / sa jupe qui ne fait qu’un seul pli, / elle va, tâtant par-ci, tâtant par-là, / dans la pluie qui cingle, dans le vent qui rit, / - qui pleure, qui miaule, qui chante, qui beugle – l’aveugle…//La pluie coupe comme une éteule. // Ses souliers sont moins cuir que trous ; / ses bas ne sont plus que de l’eau ; / ses pieds, c’est de la glace en marche…/

19 Elle courbe le dos comme une voussure, / ses bras et son bâton contre le mur / tâtent ensemble…) Tout au long de ce long poème, nous accompagnons l’aveugle en sa triste pérégrination, devant des portes qui ne s’ouvrent pas ou qui se referment à peine entr’ouvertes, dans l’indifférence des nantis, pour qui tous les prétextes sont bons pour ne rien lui donner. Tout au long de ce long poème, reviennent de brèves notations, comme un refrain lamentable, rappelant que la pluie, cette pluie qu’on dirait éternelle, tombe toujours, dans la grisaille de ce matin de dimanche. Seul le poète la fera entrer, lui offrira une tasse de café… mais il semble bien que cela n’est qu’un songe, une bonne intention qui n’est pas réalisée. Le poète est comme les autres, maladroit, incertain… le destin est ainsi fait : au terme de la promenade, le monde reste tout pareil, lugubre, désenchanté : « (Èl pieufe coupe come in champ d’èsteûle…)/ Èlle èst voye in taustant là…ci…/ L’cayau du tch’min du paradis / Dins l’pieufe qui r’late, dins l’ vint qui rit, / - Qui brét, qui miâwe, qui tchante, qui r’beûle – L’aveûle ! » (La pluie coupe comme une éteule…) // Elle est partie tâtant par là…tâtant parci… / Le pavé de la route du paradis, / dans la pluie qui cingle, dans le vent qui rit, / - qui pleure, qui miaule, qui chante, qui beugle - / l’aveugle ! » Le paradis surgit soudain, comme une récompense, une revanche sur le mauvais sort, sur le mépris des nantis… s’il y a un paradis ? Car le poète vient de définir bien autrement l’endroit qui l’attend : « Èlle-è-st-au trau dès mautchaussis, » « Elle est au trou des mal chaussés. » Misérabilisme ? Il faut tout de même se rappeler que les « golden sixties » sont encore loin, et que l’on sort à peine d’une dure guerre, au cours de laquelle les pauvres gens avaient du mal à se nourrir, tandis que les trafiquants du marché noir s’enrichissaient à leurs dépens. Il est vrai aussi que Dewandelaer luimême a souffert de la captivité, d’une maladie qui l’a fait mourir très jeune. Et puis, il y a aussi, chez lui, comme chez Georges Wiame, comme chez Willy Chaufoureau, une sorte d’allégresse, non dépourvue d’esprit critique parfois acerbe, d’ailleurs, à l’égard de leur ville. Les Nivellois sont loin d’être des naïfs. Mais écoutons, toujours dans le numéro de la SLLW, les réactions de Louis Gilliard : « Elle (Gabrielle Bernard) , comme moi, étions de ce peuple d’en bas, comme on dit aujourd’hui ; nos familles avaient connu ‘l’bougnou des fosses’. Nous n’étions pas des militants. Simplement des poètes qui ressentaient en leur chair et en leur esprit une ignominie qu’un grand poète wallon dénonçait avec tant de vigueur et d’art. Elle avait livré son message. Pour moi, je trouvai à portée

20 d’esprit, à portée de main l’œuvre exceptionnelle d’un grand frère. (…) Il a créé un style qui lui appartient en propre ; il avait le souffle d’un créateur d’épopées ; il a enrichi notre littérature de comparaisons, d’images neuves, comme tout véritable grand poète l’a fait dans toutes les langues ». Il notera d’autre part que c’est le P.Guillaume qui l’a vivement poussé à fréquenter l’œuvre de Franz Dewandelaer. On ne peut parler là d’une école littéraire – celles-ci sont d’ailleurs toujours bien fragiles. Mais bien plutôt d’une communauté d’inspiration devant les malheurs du temps, la déchéance à laquelle sont condamnés les gens les plus pauvres, et, parfois, à la déchéance morale de ceux qui, parfois, ont le pouvoir d’y remédier. En terminant, il nous reste à saluer le dévouement exceptionnel d’Yvan Dewandelaer à l’œuvre et à la personne de son père. Depuis de longues années, il a rassemblé nombre d’œuvres, de documents peu connus – son père n’était pas très soucieux de sa propre gloire, il écrivait vite et ne revoyait guère ses manuscrits, il en égarait parfois… Disons qu’il écrivait non pour la gloire, mais pour les gens, ce qui est tout à son honneur. Et le travail réalisé par son fils, aidé de quelques associations nivelloises, en est d’autant plus remarquable. Un grand merci encore à Jean-Jacques Chapelle, autre grand serviteur des lettres wallonnes et nivelloises. Joseph Bodson A consulter : les sites Google nivelleslewallonaclot 3, ou Franz Dewandelaer poète aclot. Tout est téléchargeable,

21 Calendrier provisoire au 28 novembre 2023 Samedi 13 Janvier 2024 Les Rôbaleus Salle du Patro – Rue L. Dewonck 102 – 4452 WIHOGNE "Bouc èt gate" De Jean RADOUX Correspondant : Jacqueline Villers – Rue Provinciale 737 -4560 Slins – 0475/38 62 85 Dimanche 21 janvier 2024 « Les Disciples de Chénier » de Gilly Salle de la Ruche Verrière à Lodelinsart – Place Ed. Gilles 19 – 6042 Lodelinsart "El Beguin Dès Bèguènes 2" De Michel MEUREE Correspondant : Jocelyne Verbracken – Chaussée de Charleroi 554 – 6220 Fleurus – 0471/23.32.90 Dimanche 28 janvier 2024 La Bonne Entente Salle Foyer Culturel – Grand Place 32 – 1360 Perwez Nos èstants dins l’bèrdouje De Christian DERYCKE Correspondant : Vankoekelberg Maurice – Rue Jean Sprimont 4 – 1360 Thorembais – 010/88 91 41 Dimanche 25 février 2024 Les Çis d’Oquîr Salle Loisirs et Cutlture – Grand Rue (Rowe) 32 – 4560 Ocquier Li paradis des aplahants De Christian DERYCKE adaptée par Yvonne STIERNET Correspondant : Francine Hebrans – Rue Aux Petites Croix 45 – 4920 Aywaille – 0491/64 12 08 Tournoi d’Art dramatique de Wallonie Calendrier 2023-2024

22 Samedi 9 mars 2024 à 20h00 Les Linaigrettes de Wibrin Salle de l’école communale de Wibrin – Rue de l’école 23 – 6666 Wibrin "C’èst co mîs d’l’après-non.ne" De Ray COONEY adapté en wallon par Isabelle GEUZAINE Correspondant : Florence BASTIN – Rue Saint Jean 11A – 6666 Wibrin – 0478/59 78 68 Samedi 16 mars 2024 à 19h30 Les Djoyeux Lurons Salle La Renaissance – Rue Wacostet 24 – 4920 AYWAILLE Correspondant : Mélissa Weber – Rue Joseph Leduc 5- 4340 Awans – 0494/28.23.66 Samedi 23 mars 2024 à 19h30 Les Longuès Pènes Salle du Relais Saint Martin – Rue du Beauvechain 56 – 1320 Tourinnes La Grosse "T’èstchaufe nin" D’après « t’emballe pas » de Christian Rossignol adapté par Raymond EVRARD Correspondant : Raymond Evrard - Rue Ryndyck 1 – 1320 Tourinne La Grosse – 0485/61 14 68 Dimanche 24 mars 2024 Dè Pôce a L’Orèye Centre Culturel de Remicourt – Rue Haute 25 – 4350 Remicourt Correspondant : Carine Martin – Rue du Paradis 21 – 4432 Xhandremael – 0497/13 90 05 La finale du 87ème GPRA se déroulera au Théâtre du Trianon à Liège le samedi 1er juin à 15h

23 publicité payante

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